ANCESTRAMIL


HISTORIQUE

DU

174° Régiment d’INFANTERIE

 

Formé le 11 février 1915 par ordre n° du 5 février du général commandant en chef, créant la 48° DIVISION, composée des 95° et 96° BRIGADES, de nouvelle formation avec 2 bataillons tirés du 170° Régiment d’Infanterie, alors stationné dans la région de Retheuil (Aisnes), et un bataillon de marche venu de Langres, et fourni par le 21° Régiment d’Infanterie.

 

Le 174° Régiment d’Infanterie, commandé par le Lieutenant-colonel VERET forme, avec le 170°, la 95° Brigade d’Infanterie.

Un mois à peine après sa formation, pour ses débuts, le 174° prend une part très active aux combats de Mesnil-les-Hurlus (Côte 196, Bois Jaune Brûlé) du 12 au 26 Mars 1915.

Malgré les fatigues de plusieurs jours de tranchées au contact continue de l’ennemi, la troupe fait preuve de beaucoup de mordant et d’enthousiasme. Les pertes éprouvées ont été très sensibles, les chefs ont la conviction de pourvoir dire que toutes les pertes ont été faites face à l’ennemi sans que le plus petit mouvement de recul se soit produit, au contraire, du terrain à été gagné.

 

Le 27 mars, le Régiment quitte ses emplacements après relève pour aller bivouaquer aux environs de Somme-Tourbe, d’où il part après avoir été reconstitué en partie, pour gagner son cantonnement de repos, d’abord Saint Amand s/Flon, puis Somme-Vesle.

 

Le 25 avril 1915, le Régiment est enlevé en automobile à 9 heures du soir, pour être transporté dans la région de Verdun (Meuse), région dans laquelle il a débarqué le 26 avril. Il cantonne à Belleville jusqu’au 1er mai, date à laquelle il exécute son mouvement par voie de terre pour se rendre dans la secteur des Eparges qu’il est chargé d’occuper.

Durant son occupation, du 3 au 9 mai, sans céder un pouce de terrain, le Régiment contribue fortement à repousser les attaques allemandes du 5 mai, dirigées notamment sur sa droite (2 bataillons) et à infliger à l’ennemi de lourdes pertes…

 

Le 10 mai 1915, le régiment va prendre, après relève, quelques jours de repos à CHEVERT, près de Verdun.

Il embarque, en gare de Dugny, le 14 mai et fait mouvement par voie ferrée pour gagner le secteur de Notre Dame-de-Lorette, secteur très mouvementé, dans lequel il prend part aux opérations du 19 au 26 mai.

Pendant cette période, il occupe l’éperon de Notre Dame-de-Lorette, sous un violent bombardement, qui bouleverse les tranchées et les boyaux et interdit toutes communications, il livre chaque jour d’incessants combats.

Le 16 juin, il est à Angres, où, sous l’énergique impulsion du Colonel Colonna d’Istria, il attaque la tranchée des « Saules » et l’enlève avec un entrain et une fougue irrésistibles.

Le 174° fait partie de la 48° division qui, à la suite des opération de Notre Dame-de-Lorette et d’Angres, est cité avec le 21° corps d’Armée et la 58° division à l’ordre de la X° armée pour avoir :

« Sous le commandement du Général MAISTRE, ont fait preuve, au cours des attaques renouvelées, pendant plusieurs semaines consécutives, et sous un bombardement intense et continu de jour et de nuit, de l’artillerie ennemie, d’une ténacité au-dessus de tout éloge. »

La 3° Compagnie du Régiment est citée à l’ordre de la Division n° 10 du 9 juillet  avec la citation ci-après :

« Chargée d’enlever une tranchée ennemie, défendue avec opiniâtreté, s’en est emparé sous un violent feu d’artillerie par une brillante attaque à la grenade et en faisant un groupe de prisonniers, ce qui a eu pour conséquence de couvrir le flanc droit de la Division dans son mouvement en avant et à aider la progression des troupes voisines.»

 

À la suite des différentes opérations auxquelles le Régiment a pris part sur le front de Notre Dame-de-Lorette, et d’Angres, il est appelé à opérer dans le secteur de Vingré-Confrécourt (Aisne), il fait alors mouvement en camion le 6 juillet d’Hersin-Coupigny à la gare de Saint-Pol (Pas-de-Calais), s’embarque dans cette gare et est transporté à destination de Longpont (Aisnes) où il débarque le 7 juillet à 22 heures, stationnement pendant quelques jours à Coucy, puis se rend par voie de terre à Montigny, Langrain où il profite d’un repos lui permettant de se reconstituer complètement.

Il prend enfin possession du secteur de Vingré-Confrécourt qu’il occupe pendant la période du 2 août au 16 septembre 1915.

 

Le 23 août, le régiment reçoit son drapeau. La remise a lieu à Rethondes et à Sainte-Claire.

 

Le 5 septembre, le lieutenant Colonel DUBOIS prend le commandement du régiment, en remplacement du Colonel Colonna d’Istria, promu Général.

Appelé à participer aux affaires de fin septembre 1915, le Régiment fait mouvement par voie ferrée le 27, et le voilà arrivé en pleine action devant la butte de Souain.

Là encore la lutte est rude. On se rappelle l’émoi que causa à nos ennemis le coup violent que leur asséna le Général de CASTElNAU enfonçant les lignes mêmes où 3 ans plus tard devait se décider le sort de la guerre. Plus de 30 000 prisonniers, 300 canons, tel était le bilan de cette brillante bataille.

Le Régiment eut sa part brillante, février 1916 trouve le Régiment à Verdun où, à deux reprises, sous les ordres du Lieutenant-colonel DUBOIS, il fit preuve d’une indomptable énergie.

 

Le 28 février il s’empare du « Bois Feuilla » et de la ferme de Soupleville, aux environs d’Eix. Le 3 mars, il attaque le village de Douaumont, et s’y maintient quelque temps, malgré les vigoureuses contre-attaques ennemies sortant du fort Douaumont, et un bombardement formidable de la position.

 

Le 25 avril, le 174° R.I. monte de nouveau devant Verdun, dans les secteur de Fleury, le 7 mai il attaque le fortin « Vigoureux » et la tranchée «  Morchée » et, malgré la violence extrême du bombardement, obus de gros calibre (150-210-305) et torpilles qui bouleverse nos tranchées et nos boyaux, qui ensevelit les défenseurs, les vagues allemandes, fauchées l’une après l’autre, ne peuvent aborder nos lignes ; le couteau à la main, l’ennemi s’élance sur nos positions, où le déluge de fer s’abat avec une violence inouïe, c’est une lutte gigantesque, un combat infernal : quelques allemands parviennent à 5 mètres de nos tranchées mais tombent à leur tour. Trois attaques menées avec une énergie farouche et désespérée se brisent devant nos feux, pas un pouce de terrain n’a été perdu.

Le 174° R.I. reçoit le 28 mai 1916, pour cette admirable conduite devant Verdun, la citation suivante :

 

ORDRE DE LA 11° ARMÉE

 

« Sous l’impulsion du Lieutenant-colonel DUBOIS, chef énergique, brave, et d’un remarquable sang-froid au lendemain d’une attaque qui lui avait permis de prendre pied dans un fortin puissamment défendu, a résisté, sans perdre un  pouce de terrain, à plusieurs assauts successifs et violents, précédés d’une violente préparation d’artillerie, qui avait détruit ses défenses accessoires et nivelé ses tranchées ; a fait subir à l’ennemi des pertes sérieuses. S’est toujours distingué par son endurance et sa grande bravoure, dans les nombreuses affaires auxquelles il a prit part. »

 

Engagé à deux reprises différentes sur le front de bataille de la Somme, le 174° R.I. que commande toujours le Lieutenant-colonel DUBOIS, livre plusieurs combats avec un allant et un entrain remarquables. Le 7 août, d’un élan superbe, il s’empare du bois de Monacu, et emporté par son entrain endiablé, le Régiment dépasse l’objectif qui lui été fixé et capture 230 prisonniers, il s’accroche au terrain conquis et s’y maintien malgré les violentes contre-attaques de l’ennemi qui subit des pertes sérieuses.

 

Le 12 septembre, il attaque et se rend maître de la tranchée des Berlingots et du bois Madame en faisant plus de 300 prisonniers ; par deux fois l’ennemi contre-attaque avec violence, mais chaque fois les vagues d’assaut échouent devant nos feux ; tout le terrain conquis, près de 4 kilomètres en profondeur, est resté entre nos mains. Le Lieutenant-colonel DUBOIS, qui avait commandé le 174° R.I. à Verdun et dans la Somme avec une décision, une habileté, une énergie si remarquables est appelé à remplir une mission délicate en Roumanie et le Régiment n’eut pas la récompense qu’il attendait et pour laquelle il était proposé.

 

En 1917, sous le commandement du Lieutenant-colonel DUBROCA, le Régiment prend part aux deux offensives françaises. Le 4 mai, au Godal, il s’empare d’une partie du bois Sechamp, où il fait une centaine de prisonniers, dont plusieurs officiers et prend une dizaine de mitrailleuses. Le 23 octobre, il appuie l’attaque de la Malmaison.

En 1918, c’est le Tardenois, malgré les conditions de terrain extrêmement difficiles, malgré les violents barrages d’artillerie et le grand nombre de mitrailleuses et de mitraillettes, le 174° R.I. après 5 jours de secteur attaque sur le Clignon, s’empare de la position dominante du Bois de Givry, s’accroche à l’adversaire qui, ébranlé par nos vigoureuses attaques lâche pied et recule ; le Régiment le poursuit pendant 30 kilomètres jusqu’à La Fère en Tardenois où son effectif affaibli par de lourdes pertes ne lui permet plus de continuer la poursuite.

 

BATAILLE DE CHAMPAGNE

 

Après quatre jours de repos à Vendrest, le régiment est transporté en camions dans la zone occupée par la 4° Armée, sous le commandement du Général GOURAUD, le glorieux vainqueur de Champagne. Le 15 juillet 1918, le Régiment cantonne dans la région de Vie-Dampierre, le temps est employé activement à préparer les prochaines offensives.

 

Le 12 août, le Régiment, par voie de terre, gagne le secteur du Nord de Suippes, la même où en 1915, il avait pris place pour la première bataille de Champagne.

 

Le 14 août, le Commandant de MISCAULT, prend le commandement du régiment, en remplacement du Lieutenant-colonel DELACROIX, appelé à un autre emploi.

Ce jour-là, le Général GOURAUD réunit des délégations de tous les régiments de la 4° Armée. Une magnifique revue est passée sur le Jard, au cours de laquelle le Général remet les fourragères aux Régiments qui ont livré les batailles de juillet. Cette belle cérémonie est suivie d’un banquet de 2 000 couverts offert par le Général aux plus braves d’entre les braves. À la table d’honneur et à la droite du grand Chef est assis un simple soldat décoré de la Médaille Militaire et de la Légion d’Honneur.

 

La fin du mois d’août est marquée par une activité croissante de l’ennemi. Son artillerie surtout fait un usage considérable d’obus à gaz, qui rendent le séjour dans les tranchées assez pénible et nous causent des pertes regrettables. Il faut maintenir l’ennemi en haleine, préparer le Régiment à une grande offensive qu’on sent proche.

Cependant, il faut partout être prêt à contenir une contre-offensive, toujours possible, de l’ennemi. La tâche du Régiment consiste donc à améliorer  les positions et à tenter des coups de main. Le 29 août, le lieutenant-colonel De MISCAULT monte avec le concours de l’artillerie une reconnaissance offensive dans le bois Guillaume. Dont le nom est légendaire. À 5 heures, après une préparation très courte, mais très violente de l’artillerie, la 11° Compagnie se jette sur le bois Guillaume. Les Boches qui refusent de se rendre sont tués dans leurs abris. Au bout d’une demi-heure la 11° Compagnie rentre avec 9 prisonniers. Le Général NAULIN, Commandant le 21° corps d’Armée tient à venir lui-même, dès le lendemain, remettre les récompenses aux braves qui ont appris aux Boches que le 174° régiment d’Infanterie était un peu là.

 

Le 11 septembre, c’est une forte patrouille du 1er Bataillon qui se jette par surprise à la nuit sur un poste allemand qu’elle extermine et ramène un prisonnier. Le 18 septembre les Boches tentent un coup de main sur le G.C. Frédéric à l’ouest du Bois Guillaume.

L’ennemi échoue sous les feux du 2° Bataillon et laisse 2 prisonniers entre nos mains.

Le lendemain, à minuit, le Commandant CORREARD se jette sur la tranchée de Mailly, pousse jusqu’à la côte 150, et ramène 4 prisonniers. Le Général NAULIN, comme il l’avait fait pour la 11° Compagnie, remet lui-même la Croix de Guerre aux braves de la 7° Compagnie. L’ennemi se venge en bombardant le camp des abris Roques et les abords de Suippes.

 

Le 24 septembre, l’armée GOURAUD se prépare à attaquer ; les mouvements s’exécutent dans la nuit des 24 et 25. Le 174° R.I. glisse vers l’est, s’intercale entre le 409° et le 170° R.I. IL s’établit dans la parallèle de départ dans l’ordre : 2° Bataillon (Commandant CHAPUIS, 1er Bataillon (Capitaine LE RASLE), 3° Bataillon (Commandant FRENOT.)

L’objectif est la butte de Souain, puis la tranchée de Wiesbaden, le chemin de fer de Bazancourt à Challerange, la tranchée d’Essen, troisième ligne de la première position.

Après une magistrale préparation d’artillerie, qui commence à minuit le 26, le Bataillon CHAPUIS part à l’attaque avec ardeur, malgré les tirs de barrage, les difficultés provenant du terrain, du brouillard et de la fumée, il atteint assez rapidement l’objectif qui lui a été assigné, la tranché de Corse, face à la première ligne de la butte Souain.

Le Bataillon LE RASLE exécute alors un passage de lignes, les Compagnies POTEAU et RUMEAU, appuyées par la C.M. MARTIN et l’artillerie de tranchée se lancent dans le No mans Land bouleversé, en dépit des rafales de mitrailleuses et des barrages des mines du plus  gros calibre. Le Capitaine LE RASLE et le Capitaine MARTIN sont là, en première ligne, sur la base de départ, dirigeant l’action, debout sous les balles.

Le premier Bataillon, emporté par sa fougue à travers toute la butte Souain, dévale, le long des pentes boisées le long du bois des Corbeaux et du Couperet, mais la nuit vient, il importe de s’arrêter pour fixer le barrage de nuit et se regrouper. Le premier Bataillon doit se reformer sur la butte de Souain tandis que le 3° Bataillon, (Capitaine FRENOT) exécutant à son tour un passage en lignes, occupe le bois du Couperet en contact immédiat avec l’ennemi qui, pour couvrir son artillerie lourde attardée, tient les tranchées de Wiesbaden et de Bonn. Le résultat de la journée est satisfaisant : il a été fait plus de 200 prisonniers, un grand nombre de mitrailleuses, 3 canons, « I minen de 240 » et 6 fusils contre tanks, aussi une énorme quantité de matériel, des trains entiers capturés à la station du bois du Corbeau, la position formidable de la butte de Souain, qui va permettre à notre artillerie à la faveur de la nuit de s’installer, aux tanks aussi d’aborder ; la position intermédiaire est tenue. La nuit est employée à achever le nettoyage du terrain. Un caporal ramène à lui seul 47 prisonniers. Une attaque est montée au lever du jour sur les tranchées de Bonn et de Wiesbaden, l’opération ne réussit que partiellement.  Le 3° Bataillon faisant 50 prisonniers s’empare de la tranchée de Bonn, mais est arrêté à gauche devant la tranchée de Wiesbaden.

Les tanks, pris à partie par l’artillerie ennemie, ne peuvent dépasser le bois de Couperet, pour éviter des pertes inutiles. Le Lieutenant-colonel, après reconnaissance minutieuse du terrain et entente du Capitaine FREMOT, monte une attaque brusquée, après une préparation courte et violente d’artillerie. Cette attaque se déclenche à 11 h 30. Le Capitaine BRILLAURET court littéralement après les obus. Il pénètre à la tête de sa Compagnie (10°) dans la tranchée de Wiesbaden, où il fait 200 prisonniers.

 

Le Bataillon poursuit son avance, dépasse le chemin de fer de Somme-Py, capture 4 canons de 150, 4 canons de 105 8 canons de 77 et atteint, à la nuit tombante, tous les objectifs qui lui sont assignés : le Lieutenant-colonel, résolu de pousser plus vite jusqu’à l’objectif éventuel (tranchée des Prussiens d’Essen) fait avancer les tanks jusqu’à la voie ferrée, le 2° Bataillon (Bataillon CHAPUIS) exécute un passage des lignes et se place face à l’objectif en avant du Bataillon FRENOT. Le 1° Bataillon (Capitaine DUC) quitte la butte de Souain, vient s’installer à la tranchée de Wiesbaden et à la voie ferrée.

À 5 heures du matin, le Bataillon CHAPUIS accompagne les tanks, se jette avec un magnifique élan sur l’objectif éventuel (tranchée des Prussiens d’Essen.) Il s’en empare. Le Capitaine CARASAS, à la tête de sa Compagnie, met la main sur 4 Minens contre tank, l’ennemi fuit en désordre.

Le Bataillon CHAPUIS ne pourra se maintenir qu’à force d’énergie sur cette position, en avant de 500 mètres sur les autres régiments voisins. Il est soumis toute la journée à des contre-attaques incessantes. Il faut remarquer le courage des agents de liaison DESSALES et BLANCHARD.

La situation, un instant critique, n’est maintenue qu’au prix de lourdes pertes, grâce à l’énergie du Commandant CHAPUIS  et aux dispositions du Capitaine FRENOT, Commandant le 3° Bataillon et grâce au concours éclairé des Commandants de l’artillerie, les Commandants JEANNEAU et MAILLARD.

À la nuit, les Bataillons FRENOT et CHAPUIS sont relevés par le 17° R.I. et vont se reposer sur la butte de Souain, tandis que le Bataillon DUC reste en soutien du 17° à la voie ferrée de Somme-Py.

Il serait trop long de relater tous les actes d’héroïsme exécutés au cours de ces trois journées de lutte ardente. Les citations à l’ordre de l’armée en sont le résumé éclatant.

 

Dans la nuit du 2 au 3, le Régiment se reporte en entier en avant, après un déplacement exécuté de nuit sous un violent tir de barrage. Il fait face au Nord-ouest et attaque suivant la vallée de l’Aure. Le 1° Bataillon, sous le commandement du Capitaine DUC, est en tête, le 3° Bataillon  (Bataillon FRENOT) en échelon à droite, le 2° Bataillon (Bataillon CHAPUIS), plus éprouvé, reste en arrière.

À 9 heures, les Bataillons de tête ont atteint les objectifs, la journée est employée à réduire les centres de résistance dépassés qui, à chaque instant, se révèlent dans ce terrain accidenté et boisé que celui qui ne l’a pas vu ne peut se représenter.

 

Le Régiment voisin, n’ayant pu progresser aussi rapidement, le 174° R.I. doit agir dans le secteur de droite. Là encore, il fait de nombreux prisonniers et fait ample moisson de mitrailleuses. La Compagnie RUMEAU, emportée par son élan, se lance à l’attaque d’une batterie de 77 sur la crête de Médéah. Orfeuil, elle, met en fuite les artilleurs et s’empare d’un canon.

À droite, la 11° Compagnie (Lieutenant INDRE) repousse une violente contre-attaque allemande et s’empare de haute lutte de deux nids de mitrailleuses.

Dans la nuit, le 174° R.I. reste en place, le 7 il se reconstitue, sur la position Bois des Ronces, tranchée d’Essen, le 9 va pour jouir d’un repos bien gagné dans la région de Tilloy.

Dès le 18, alerté de nouveau il file sur Suippes-Lude-Saint Thierry, sur Neufchâtel, où la division se trouve en réserve de la 5° Armée sous les ordres du Général GUILLAUMET, en face de la Hunding-Stellung.

 

Le Régiment, très éprouvé, n’a pas le temps de combler les vides creusés dans ses rangs ni de remplacer le matériel démoli. Néanmoins, le moral du 174° est très élevé ; n’a-t-il pas enfin obtenu cette fourragère tant attendue et si bien méritée pour le motif suivant :

 

 ORDRE DE LA IV° ARMÉE

 

« Régiment valeureux, aussi persévérant que mordant, appelé à participer à l’offensive après 48 jours consécutifs d’occupation de secteur a, sous la direction énergique et féconde de son chef, le Lieutenant-colonel DE MICAULT, mené pendant trois jours d’abord, puis une deuxième fois, un combat acharné où il a déployé toutes ses qualités d’audace et de ténacité. Du 26 au 29, malgré les défenses accessoires accumulées et le terrain bouleversé par le bombardement depuis quatre ans, a brisé la résistance désespérée de l’ennemi, s’emparant des organisations formidables de la butte de Souain, et de la 2° position :

« Ramené au combat dans la nuit du 2 au 3 octobre, il attaque le lendemain au jour avec la même ardeur, refoulant l’ennemi à travers un terrain boisé, raviné, parsemé de réseaux littéralement farci de mitrailleuses et parvient à prendre pied sur la crête d’Orfeuil, à la ferme de Médéah.

« Au cours de ces quatre journées de bataille acharnée, il progresse de 14 kilomètres, s’empare de 750 prisonniers, de 21 canons, dont 8 lourds et 1 de 240, de plus de 300 mitrailleuses et de 6 fusils contre tanks. »

N’a-t-il pas tressailli, d’une haine vengeresse en traversant Reims, la cité détruite ?

 

Le 22 octobre, le Régiment bivouaque aux abords de Neufchâtel,  après avoir traversé le champ de bataille du Godal, de mai 1917, le passage de l’Aisne, rendu très difficile par les destructions opérées par les Allemands dans leur retraite, imposée par la fougue des braves poilus. Grâce à la bonne volonté de tous, toutes les difficultés matérielles sont surmontées, le lendemain, les journées des 23 et 24 sont employées par les cadres à des reconnaissances, par la troupe à l’amélioration des communications.

 

Le 25, le 174° R.I. se porte en avant dans la région de Lor (Ferme de Ramonchamp). Nos troupes subissent quelques pertes du fait du bombardement ennemi.

 

Le 26, la 167° D.I. relève la 43° sur les positions conquises au Nord de la Thour, face à Banogne, les 2° et 3° Bataillons sont en première ligne, le 1° Bataillon en réserve.

La journée du 28 est employée en organisation du terrain et préparation de l’attaque. Le canon de 37 s’installe en première ligne.

 

Le 29, après une préparation d’artillerie violente, mais mal réglée en raison du brouillard, la Division se porte à l’attaque : les Bataillons FRENOT et CHAPUIS se lancent dans un magnifique élan, les premières vagues du Bataillon FREMOT pénètrent dans le moulin de Banogne. La 9° Compagnie, sous le commandement énergique du Sous-lieutenant NOËL, tient toute la journée, sous un feu infernal sur ce point capital, contre lequel l’ennemi concentre tous ses moyens. Le Sous-lieutenant pousse même en avant de ce point d’appui au milieu des fils de fer. Il est blessé, le Bataillon, arrêté dans sa progression,  se fixe sur le terrain et tient la position conquise jusqu’à la retraite. Cependant, le Bataillon CHAPUIS, traverse le glacis de 600 mètres qui sépare Banogne de la base de départ.

La C.M. 2 se met en batterie à découvert à courte distance de l’ennemi. Cette audace lui cause des pertes douloureuses. L’ennemi résiste ; c’est en vain que les pionniers cherchent à cisailler les fils de fer, ils sont trop larges ! les deux bataillons subissent des pertes très lourdes, mais en dépit d’une lutte opiniâtre, ils s’accrochent au fils de fer. Le Bataillon FENOUIL, à la nuit relève les deux Bataillons d’attaque. Jusqu’au 5 novembre, la Division lutte avec énergie sur la position conquise pour étendre les gains du 29 octobre.

 

Le 5, de grand matin, le Commandant CHAPUIS, dont les patrouilles audacieuses parcouraient chaque nuit les réseaux de fils de fer, signale que l’ennemi semble s’être replié. Le Lieutenant-colonel lance aussitôt l’ordre de poursuite ; les Bataillons en formation échelonnée, sans se laisser arrêter par le barrage de 105, poussent rapidement au-delà de la côte 162, le Régiment, à la nuit bivouaque sur le terrain conquis. Le 6, de grand matin, la poursuite est reprise, ardente, et malgré tous les obstacles accumulés par l’ennemi, rupture de routes, inondations.

À 4 heures, le 174° R.I. pénètre de vive force dans Chaumont-Porcien, devant lequel notre cavalerie est arrêtée, libère une population française de 600 habitants et s’installe aux avant-postes à l’est de cette localité.

 

Le 7, la poursuite continue, le Régiment fait un bond en avant d’une quinzaine de kilomètres et vient s’établir à Montmeillant, le 9 il est relevé et cantonne à Saint-Fergen, c’est là que le touche la nouvelle de l’armistice qui met fin aux hostilités.

Le 174° R.I. cantonne le 12 dans la montagne de Reims, le 13, près de Repaille. Le Général MAISTRE, devant le premier Bataillon et des détachements de la 167° D.I. remet au drapeau du Régiment la Fourragère, si bien gagnée par 4 années d’efforts constants.

Dans le cantonnement de Vaugemange, le Régiment célèbre gaiement la fin de la Campagne par des feux d’artifice, des séances récréatives où chacun fait œuvre d’excellente camaraderie, en distrayant le voisin.

 

Le 20, le Régiment fait mouvement pour aller cantonner dans la région de Fère-en-Tardenois, à la ferme de la Logette, où un pieux pèlerinage est fait aux tombes des héros tombés au mois de juillet de la même année en refoulant les Allemands.

Dans les premiers jours de décembre, traversant tous les champs de bataille de la Marne, le Régiment va cantonner dans la région d’Arlonges, et Pargny-la-Dhuys, ce n’est que le 12 janvier qu’à son tour il s’embarque pour cette chère Alsace, de Château-Thierry, il est dirigé sur Rambervillers et par étapes, il gagne Wissembourg, et occupe successivement Lembach, Wotth, Haguenau, enfin Saverne te Sarre-Union.

Dans le début d’avril, il est embarqué en chemin de fer pour Armsheim et cantonne jusqu’aux premiers jours de mai à Wolstein, Wolsheim, Hakenheim, Frelanberseheim, dans la Hesse Rhenane, puis il gagne Mayence et s’installe aux abords de Wiesbaden.

Il prend part, le 14 mai, au service d’honneur organisé pour saluer le Maréchal FOCH, faisant son entrée solennelle à WIESBADEN.

C’est là, à Bierstad, qu’il est dissous, le 10 juin. Le Lieutenant-colonel DE MISCAULT présente une dernière fois le drapeau aux braves du 174° R.I.. Le 12 juin, le Général SCHMIDT, Commandant la 167° D.I. salue le drapeau  devant les drapeaux et étendards de la 167° à la gare de Wiesbaden.

Le Sous-lieutenant NOËL, conduit à Epinal (Dépôt du Corps) ce glorieux symbole.

 

Le 13 juin, le 174° R.I. n’existe plus.

Les jeunes classes sont versées au 12 Tirailleurs, les autres hommes sont répartis dans l’ensemble de la 10° Armée.

 

Le 174° R.I. a eu une existence éphémère, mais bien remplie. Créé en vue des affaires du printemps de 1915 qu’on espérait victorieuses, il a été engagé tout de suite à fond jusqu’au début de l’hiver 1915-1916. Il a donné à plein deux fois de suite à Verdun, deux fois dans la Somme, puis au Nord de Reims ; il a coopéré aux beaux succès de la Malmaison, puis après un hiver laborieux dans les Vosges, il a combattu sans arrêt du 31 mai à l’armistice.

Après avoir coopéré à l’arrêt du Boches sur Fourcq, il l’a repoussé victorieusement en Tardenois, battu à fond en Champagne et poursuivi sans relâche à travers les Ardennes.

Sa tâche remplie, il disparaît en pleine gloire, à la veille de la signature du traité de paix, au cœur même de l’Allemagne, à quelques kilomètres de Francfort.

Le souvenir des braves qui ont porté bien haut la gloire du Régiment, qui sont tombés sur tous les points du front sera gardé.

 

Le numéro 174° se retrouvera sur les plis de son drapeau,  sur les canons ennemis pris au mois de septembre 1918, et sur des centaines de tombes qui jalonnent sur tout le front des étapes glorieuses.

 

Jérémie Bourillon

Généalogie facile
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