Franceschino COLONNA d'ISTRIA

Document Dominique Benetti (8-H-11.213.411)


Cette histoire est racontée par Gracieux Faure, dans En Corse. Récits dramatiques et pittoresques, publié à Paris en 1885. Le récit figure au chapitre IX, intitulé « Franceschino Colonna », pages 75 à 90 du tome II. Le voici :

« Olmeto, canton de l’arrondissement actuel de Sartène, formait autrefois une terre féodale, appartenant à la famille des Colonna d’Istria. Son territoire est très fertile en céréales et en vin ; ses oliviers sont les plus beaux. Son chef-lieu bâti sur une pente rapide, couronnée de rochers et de forêts, jouit d’un horizon magnifique, et possède de nombreux et gracieux villages. 

Au-dessus se trouve un autre canton, celui de Petreto-et-Bicchisano, l’un des plus beaux, des plus riches, des plus délicieux de la Corse entière. Sollacaro est un des principaux villages de ce canton. C’est là que se trouve la fontaine Charles-Martel ; là qu’Alexandre Dumas a placé son roman Les Deux Frères corses [sic] ; là que naquit dans les premières années de ce siècle Franceschino Colonna, cet étrange bandit dont vous m’avez demandé les aventures. Sa famille était non seulement une des plus importantes de la contrée, mais l’une des plus illustres de la Corse entière ; et son éducation fut en rapport avec sa naissance.

Il montra, dès son premier âge, beaucoup de finesse d’esprit, de hardiesse dans le caractère, de vivacité dans l’imagination. Du reste, né et élevé dans une des plus pittoresques parties de la Corse, au milieu de toutes les beautés de la nature et des plus intéressants souvenirs de l’histoire, il contracta, sans s’en apercevoir, une teinte d’exaltation et de mysticisme, qui aidera plus tard à expliquer certaines circonstances de sa vie.

Franceschino avait deux sœurs, qu’il aimait tendrement. Il les maria avec les deux fils d’un de ses propres cousins, le capitaine Colonna, qui habitait aussi Sollacaro.

Ce double mariage fut heureux. Les deux familles vivaient dans la plus étroite intimité, lorsqu’il plut à la mort de s’en mêler, de changer en deuil ce bonheur sans mélange. Un des fils du capitaine, revenant de la chasse, couvert de sueur et de poussière commit l’imprudence de boire précisément à la fontaine de Charles-Martel, dont les eaux sont comme glacées, et contracta une maladie de poitrine, dont il mourut au bout de quelques jours. Restée veuve sans enfants, sa femme passa une année entière dans l’appartement de son mari, occupée à pleurer, à prier, à chanter des lamenti. L’année écoulée, elle devait selon les usages de la Corse, rentrer dans la maison paternelle, qui était celle de son frère. Franceschino lui fit à cet égard les remontrances les plus sévères. Elle se serait soumise si le capitaine ne s’y fut formellement opposé. On dit même qu’étant une fois retournée dans le domicile de son frère, le capitaine l’en fit sortir par ses sollicitations et ses instances.

La conduite du capitaine pouvait s’expliquer d’une manière aussi simple qu’honorable. Veuf, n’habitant pas avec son autre fils, il avait besoin d’une personne sûre pour tenir sa maison : il était donc naturel qu’il songeât à retenir sa belle-fille. En tout autre pays, cette combinaison n’eût pas offert d’inconvénient ; en Corse, elle avait contre elle les préjugés et l’opinion. Sans doute, il ne faut pas être esclave des préjugés ni de l’opinion publique ; mais il est bon d’en tenir un certain compte et de ne pas les mépriser. Ce qu’il y a de positif, c’est que Sollacaro et les pays voisins s’émurent et se scandalisèrent de cette situation anormale ; les mauvaises langues entrèrent en campagne, les soupçons injurieux naquirent, les propos offensants circulèrent.

 Qu’eût fait tout autre à la place de Franceschino ? Des observations sérieuses à sa sœur et à son cousin : son droit et son devoir n’allaient pas plus loin. En cas d’insuccès, il aurait pu rompre avec eux, les laisser, à leurs risques et périls, agir comme ils l’entendaient. Mais Franceschino était d’une susceptibilité extrême en matière de mœurs et de réputation ; rien ne lui était cruel comme de voir quelqu’un des siens devenir sous ce rapport l’objet des railleries et du mépris public. Ayant eu, certain jour, une dernière et vive explication avec le capitaine, et celui-ci persistant avec hauteur dans son refus :

- Tu le veux donc ? s’écria Franceschino, outré de colère. Eh bien ! Garde-toi ! A partir de demain, nous sommes en inimitié.

Sachant bien à qui il a affaire, le capitaine fait aussitôt murer à hauteur d’homme ses fenêtres, et ne sort plus de chez lui. Quant à Franceschino, ne respirant plus que la vengeance, il ne rêve qu’aux moyens de surprendre son ennemi.

Le capitaine se levait de grand matin, et passait parfois des heures entières à sa fenêtre, occupé à respirer l’air frais, à contempler le réveil de la nature et le lever du soleil. Franceschino supposait que, malgré les fortifications ajoutées à ses fenêtres, il cèderait un jour ou l’autre à l’habitude et se découvrirait. Quant à lui, blotti sous un épais berceau de treilles, il guettait, toujours prêt à faire feu. Le cinquième ou sixième jour d’attente, le capitaine se rase, vide sa cuvette par-dessus la cloison, et, comme il est de haute taille, se dresse machinalement sur ses pieds, pour voir tomber l’eau. Franceschino presse la détente, et le renverse foudroyé.

Les deux familles étaient également influentes : de grands malheurs étaient à prévoir. La famille du capitaine avait pour elle les voltigeurs et les gendarmes ; Franceschino avait pour lui les nombreux carbonari du canton, dont il était le chef suprême. Aussi, au premier bruit de la mort du capitaine, lorsque les voltigeurs, cantonnés à Sollacaro, prennent leurs armes pour courir après le meurtrier, ils se trouvent entourés par une infinité de carbonari, qui les tiennent bloqués jusqu’à leur caserne, et les empêchent d’en sortir, jusqu’à ce que celui-ci ait réglé ses affaires et se soit mis en sécurité.

Il garda le makis pendant quatre ou cinq ans, errant d’un lieu à l’autre, comme les bandits ordinaires, évitant les embûches de ses ennemis et la poursuite des gendarmes. Ce n’est pas qu’il fût moins courageux qu’un autre ; mais, le point d’honneur satisfait, il n’éprouvait plus de haine contre personne, et avait horreur du sang humain.

Le silence et l’isolement, qui ne le quittaient pas dans les lieux sauvages qu’il fréquentait, agirent sur son esprit naturellement méditatif : il releva sa tête vers le ciel et la contemplation des choses éternelles ; il réfléchit sérieusement à son crime, et parvint à en concevoir le plus profond regret.

- Malheureux ! disait-il, j’ai tué un de mes semblables, de mes amis et de mes proches, sans lui donner le temps de faire un acte de contrition ! Je l’ai peut-être précipité dans les abîmes de l’enfer, et suis cause de sa damnation éternelle ! Malheur à moi ! Malheur à moi !

Nuit et jour cette pensée le poursuivait et le tourmentait ; nuit et jour il lui semblait voir le capitaine se dresser devant lui, comme un spectre ensanglanté, qui lui reprochait son malheur. Non content de se frapper la poitrine, il priait sans cesse et partout pour sa victime. Les bûcherons le rencontraient dans les forêts, prosterné au pied d’un arbre, arrosant le sol de ses larmes ; les bergers le trouvaient sur les montagnes, les yeux tournés vers le ciel, chantant des psaumes et des hymnes, demandant miséricorde. Depuis cette époque, il ne cessa de porter son fusil la crosse en l’air, pour déclarer qu’il ne ferait plus jamais usage de ses armes.

 Le bruit de ce changement extraordinaire s’était répandu non seulement dans tout le canton de Petreto, mais dans tous les arrondissements de Sartène et d’Ajaccio : partout l’on ne parlait que de la vie austère et pénitente que menait Franceschino au milieu des makis ; et, comme il arrive d’habitude, les récits populaires exagéraient encore la vérité, et lui attribuaient beaucoup plus de choses qu’il n’en faisait réellement.

Une circonstance singulière vint alors le fixer dans cette voie nouvelle, et porter au plus haut degré l’exaltation de son esprit. C’était en 1827 ou 1828 [l’assassinat du capitaine eut lieu, dans la réalité, en 1833]. Après une journée de courses et de fatigues, il venait de s’étendre sur le lit de mousse où il couchait, au fond d’une caverne perdue dans les rochers. Etait-il endormi ? Etait-il éveillé ? Beaucoup pensent qu’il dormait ; il affirmait, lui, qu’il était éveillé, parfaitement éveillé, et que ses yeux étaient ouverts de toute leur grandeur. Quoi qu’il en soit, éveillé ou non, il lui sembla voir Notre-Seigneur Jésus-Christ, le coude appuyé sur l’un des bras de sa croix, qui le regardait avec tristesse, et lui disait : - Tu as commis un grand crime ; mais la voix de ton repentir est montée jusqu’à mon Père : fais pénitence, et ne renonce pas à l’espoir du salut.

Et le lendemain, d’après la rumeur universelle, sitôt que le jour fut venu, il trouva sur sa poitrine un petit crucifix, d’une matière et d’un travail singuliers, qu’il ne possédait pas la veille, et qui le confirma dans la vérité de sa vision.

Réelle ou non, cette vision produisit sur son esprit une impression profonde. Aussitôt il déposa son fusil pour ne plus le reprendre, et s’occupa de chercher un confesseur pour l’éclairer et le conduire.

Il y avait alors à Porto-Vecchio un curé, nommé Dealma, qui jouissait d’une grande réputation de science et de sainteté : c’est à lui qu’il résolut de s’adresser. Il partit sans perdre un moment. La route n’était qu’un étroit sentier, que l’on ne suivait pas facilement, même en plein jour, et qui circulait à travers les rochers et les précipices. La nuit le surprit dans les montagnes escarpées qui séparent la vallée de l’Ortolo des plaines de Porto-Vecchio. Il perdit naturellement le sentier. Après d’inutiles efforts pour le retrouver, il s’abrita et s’endormit sous deux rochers appuyés l’un contre l’autre, et formant une espèce de pont… Le lendemain, à son réveil il reconnut avec épouvante qu’il s’était arrêté juste au bord d’un effroyable abîme : s’il eût fait un pas de plus, il serait descendu à quelques centaines de mètres de profondeur verticale ! Il vit encore dans ce fait, et il n’eut peut-être pas tort, une bienveillante intervention de la Providence en sa faveur.

De retour dans son pays, Franceschino échangea ses vêtements contre une robe de capucin, se ceignit les reins d’une corde, et commença une existence digne en tous points des solitaires de la Haute-Egypte. Il jeûnait tous les jours au pain et à l’eau ; le temps qu’il ne donnait pas à la prière, était consacré aux œuvres de charité. Bientôt même, enflammé d’un zèle ardent pour le salut des âmes, il parcourut les hameaux et les villages, faisant le catéchisme aux petits enfants, prêchant sur la place publique pour les grandes personnes, étouffant les procès et les querelles, mettant la paix dans les familles, rapprochant et réconciliant les ennemis.

Cette conduite exalta jusqu’à l’enthousiasme les sentiments populaires : on le suivait partout pour le voir et l’entendre ; sa parole était celle des prophètes, ses conseils articles de foi ; partout on demandait à genoux sa bénédiction ; on le regardait comme un saint, et l’on en vint bientôt à lui attribuer une foule de miracles. Le clergé lui-même subit son influence : bon nombre de ses membres allaient le consulter comme un oracle.

Vous me demanderez peut-être quel était en tout cela le rôle des voltigeurs et des gendarmes. Dans le principe, ils le poursuivirent avec vigueur ; mais dès qu’ils l’avaient vu jeter ses armes, revêtir l’habit du solitaire et devenir inoffensif, ils se détournèrent de lui, pour courir après des bandits autrement redoutables. D’autre part, ils n’étaient pas loin de partager sur son compte l’opinion générale ; et plus d’un se fût fait scrupule de porter la main sur un aussi saint personnage. Son arrestation d’ailleurs n’aurait pas été facile : les populations enthousiastes s’y seraient probablement opposées. Enfin, sans qu’il le sût, de nombreuses sentinelles veillaient sur lui nuit et jour, dont il n’était pas aisé de surprendre et d’endormir la vigilance.

 La révolution de 1830 venait d’avoir lieu. M. J… était préfet de la Corse. La réputation de Franceschini et l’exaltation de son esprit avaient atteint les dernières limites. Ce fur alors que se passa un fait extraordinaire, inouï, que l’on ne croirait pas, si l’on en avait été seul témoin oculaire.

Un jour, je ne sais plus dans quel village, Franceschino se présente à midi sur la place publique, et fait sonner les cloches pour réunir les habitants :

- Mes amis, cette nuit, au milieu des ténèbres, une grande lumière s’est manifestée à moi, Jésus-Christ s’est manifesté de nouveau. Il n’avait plus cet air triste et sévère ; il me regardait et me souriait avec bonté. “Mon Père, me dit-il, a écouté tes plaintes : ton crime est mis en oubli ; et, pour que personne ne l’ignore, il te sera, mon fils, donné de rappeler à la vie celui que tu as si malheureusement assassiné ; et ce miracle te servira de témoin devant les hommes de foi et les impies“ – En conséquence, le 15 juillet prochain, à neuf heures du matin, rendez-vous tous sur les bords du Taravo, au tombeau de la famille Colonna ; et sous vos yeux, par la grâce de Dieu, je ressusciterai le capitaine que j’ai eu le malheur de tuer voilà quelque vingt ans.

Le bruit de cette apparition merveilleuse et de la prochaine résurrection du capitaine se répandit en un clin d’œil dans toute la Corse ; personne ne mit en doute que le miracle annoncé ne s’accomplit. Des campagnes, cette émotion passa dans les villes ; la préfecture et l’évêché s’en préoccupèrent eux-mêmes. Dès la veille du jour fixé, une foule immense était accourue de tous les points de l’horizon dans cette belle vallée où le Taravo promène ses eaux limpides. On n’évalue pas à moins de vingt mille les spectateurs qui entouraient le lendemain le tombeau du capitaine : les rochers en étaient couverts ; les arbres fléchissaient sous leur poids.

Pour avoir, sur ce qui allait se passer, des renseignements incontestables, le préfet s’était personnellement rendu sur les lieux, afin de tout voir et de tout entendre par lui-même ; il était escorté de toute la gendarmerie des deux arrondissements, et de trois cents hommes de troupe de ligne. Monseigneur l’évêque s’était fait représenter par un grand vicaire, qui était son frère ; mais, au lieu de se transporter sur place, celui-ci avait cru devoir se tenir à distance, et attendre les événements au chef-lieu du canton d’Olmeto.

- Vous croyez donc à la possibilité du miracle ? disait quelqu’un au préfet J…

- Je ne répondrai ni oui ni non. La réputation de Franceschino est telle ; tout ce qu’on raconte de lui est si extraordinaire, qu’en vérité l’on ne sait plus que croire. Du reste, nous serons bientôt fixés : s’il ressuscite le mort, je suis le premier à m’incliner ; dans le cas contraire, je le fais arrêter et le livre à la justice.

Cependant l’heure fatale approchait ; l’agitation de la foule croissait de plus en plus : tantôt elle ondulait comme les vagues de la mer, ou comme un champ de blé que tourmente un champ impétueux ; tantôt elle se dressait immobile sur ses pieds, pour voir apparaître de loin le thaumaturge ; tantôt elle retombait sur elle-même, dans un frémissement universel. Franceschino ne paraissait toujours pas. Où était-il ? Que faisait-il ? Pourquoi ne venait-il pas ? Autant de questions que l’on se posait dans les groupes ; mais personne ne mettait en doute son arrivée.

Toutefois, le temps marchait : neuf heures sonnaient ; puis neuf heures et demie, puis dix heures… Une heure de retard ! Pourquoi ne vient-il pas ? Le voici !... Il avait passé la nuit à Zicavo, chez un de ses parents ; et, soit que ce parent ne partageât pas se confiance à l’égard du miracle, soir qu’il craignit que sa présence ne soit une occasion de désordres, il l’avait enfermé à deux tours dans sa chambre, d’où une surveillance attentive l’empêchait de sortir.

- Voyez-vous ? s’écria tout à coup le préfet de sa voix la plus retentissante, voyez-vous ? Le miracle devait s’opérer à neuf heures, il en est dix, et le capitaine dort toujours ! Votre Franceschino n’est qu’un imposteur, qui se joue de la crédulité publique…

A ces mots, un cri d’indignation sort de toutes les poitrines ; un des notables habitants d’Olmeto s’élance vers le préfet, l’apostrophe vivement, le saisit à la gorge, et le frappe d’un coup de poing sur la figure. La foule, qui est armée, entre en mouvement ; la troupe se prépare ; une lutte affreuse est imminente, quand tout à coup la nature s’en mêle, et les éléments viennent l’empêcher.

Ce point n’est pas une fiction poétique, mais un fait certain. Au moment critique, un épouvantable orage éclate sur la vallée ; pendant plus de deux heures, la pluie tombe par torrents… Les soldats se retirent en bon ordre ; la foule se sauve en criant : “Vive Franceschino ! Le Ciel se déclare pour lui !“

Le fait est que jamais trombe ne vint plus à propos. Sans elle une collision était inévitable ; et la vallée du Taravo, qui s’attendait ce jour-là à voir ressusciter un mort, eût probablement vu mourir grand nombre de vivants.

- Que pensez-vous de tout cela mon commandant ?

- La résurrection d’un mort est un miracle de premier ordre, qui ne peut être opéré que par Dieu même, ou par un homme à qui Dieu a donné pouvoir de l’opérer en son nom. Voilà le principe.

Dans le cas dont il s’agit, je crois que ceux qui enfermèrent Franceschino lui tirèrent une belle épine du pied : car enfin, si Dieu avait décidé de faire par ses mains ce miracle, pourquoi, en ayant été empêché le 15 juillet, ne l’a-t-il pas fait le 16 sans tambours ni trompettes ? Si on l’eût vu, le lendemain, dans les rues de Sollacaro, se promener bras dessus, bras dessous, avec le capitaine que tout le monde savait mort depuis si longtemps, le miracle en eût-il eu moins d’éclat, pour la gloire de Dieu et la réhabilitation de son serviteur ? Franceschino fut sans doute la dupe d’une de ces hallucinations, moins rares qu’on ne pense.

Après cette aventure, craignant que le préfet ne lui fît payer cher le coup de poing qu’il avait reçu, les parents de Franceschino lui conseillèrent de passer en Italie. Il s’embarqua à Porto-Vecchio, sur une gondole allant à Livourne. A la hauteur de Capraja, la mer devint mauvaise, le nord-ouest se mit à souffler avec une grande violence. Parmi les passagers, se trouvait M. Aureli, de Porto-Vecchio, auquel on donnait le titre d’amiral, parce qu’il avait commandé une escadrille sous le roi Murat. Le patron de la gondole ayant perdu la tête au moment où elle lui était le plus nécessaire, l’amiral se mit au gouvernail ; mais la mer était si affreuse et l’obscurité si grande, qu’ils couraient de véritables dangers. Tout à coup, à la lueur d’un éclair, il aperçoit à ses côtés Franceschino, qui lui dit avec assurance :

- Ne craignez rien : demain à sept heures, vous entrerez dans le port.

Ils y entrèrent en effet. A peine débarqué, Franceschino se rendit à Rome, se présenta au célèbre moine Fra Paolo, qui l’envoya dans le couvent de Macerata, où il se fit religieux, et mourut voilà quelques années, laissant après lui une grande réputation de sainteté. »

 

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