Association pour l’Étude Généalogique et Historique de la Famille Colonna d’Istria

 

 

                                                                                                                 ISTRIADES 2013

 

En attendant les images réelles, qui ne sauraient tarder, permettez-moi ces quelques mots sur celles virtuelles que ma mémoire tient encore, avant que le flou des jours à venir n’en vienne voiler le souvenir.

 

Pour cette troisième édition, nous avions décidé de mettre à profit ce long weekend au travers d’une découverte des lieux historiques ou pittoresques de l’Istria, à savoir :

Vendredi 1er novembre, Petreto Bicchisano. Sollacaro

·                Autel polychrome en l’église de Petreto

·                Couvent Saint François

·                Torre, Suprana, Mezzana, Suttana

·                Maison de Jean-Baptiste Colonna d'Istria

·                Maison dite des moines

·                Château d’Istria

Samedi 2 novembre, U livanti

·         Istriades

Le programme était chargé mieux qu’un  tour opérateur des plus ambitieux eut pu espérer, sauf qu’à l’impossible nul n’étant tenu, et n’ayant de compte à rendre qu’à nous-mêmes, nous avons su prendre notre temps, tout notre temps. Il a fallu, pour commencer, mettre la main sur la clef de l’église de Petreto fermée à double tour, bien qu’en toute logique elle eut dû être ouverte, à grands battants, prête à accueillir en cette heure consacrée la foule des fidèles. Mais la foule des grand-messes n’est plus, et ne sont plus les prêtres à pouvoir prêcher chacun, pour sa seule paroisse.

 

Finalement, grâce au dévouement, au savoir de Toussaint Fieschi, anciennement maire de Petreto Bicchisano, après un parcours du combattant de Petreto à Bicchisano et retour suivi de deux tours de clef dans la serrure, nous pouvons enfin admirer sous l’abside, ce bel autel tout de marbre polychrome. La légende rapporte que ledit autel, sis en la chapelle du couvent Saint François -aujourd’hui disparue avec l’aile du bâtiment qui l’abritait,- aurait été nuitamment déposé de Saint François et rebâti en l’église de Petreto. Cela se passait à la révolution. Chacun peut admirer, photographier, commenter, toucher, ou se recueillir, dans un temps soudain arrêté, dans la plus grande sérénité, sans doute avec ce sentiment de paix qui nous étreint, franchi le seuil de son chez-soi, après une longue absence.

 

Les portes refermées, les lieux rendus aux ombres du passé, cahin-caha, nous nous retrouvons au couvent chez Jean-Baptiste d’Ornano. Notre visite se voulait impromptue, c’était oublier l’homme, Jean-Baptiste. Si le pas est moins assuré, l’œil, l’esprit et la mémoire sont bien ajustés. Il se fait un plaisir plus qu’un devoir, de venir parmi-nous, avec nous, de nous accompagner, de nous raccompagner, la main ferme sur sa canne. Quel bonheur pour certain de revivre avec lui l’Afrique, si lointaine et pourtant si présente malgré les décennies. Rare moment où le temps encore lui, se dématérialise.

 

Mais ce qui est écrit est écrit, la matinée  devait cesser.  Et elle cessa ! Pressée par les  assauts meurtriers de midi, douze coups impitoyables assénés depuis le beffroi de Petreto puis de celui Bicchisano, venu à la rescousse et porter l’estocade, comme le torero dans l’arène, la matinée succomba : rien n’en réchappa rien, ni minute, ni seconde :  c’en était fini ! Heureusement pour nous, l’heure est universelle et apolitique, sans quoi... Au revoir donc Torra Suprana, Mezzana, Suttana, maison de Jean-Baptiste, des moines. Nous reviendrons. A proxima volta. Nos estomacs, soudain éveillés aux dures réalités de la vie battent le tocsin, la minute renaissante est aux mandibules et nous courrons au Cyrnos. Branle-bas de combat en cuisine, nous arrivons 34, on nous attendait 17. Hauts les cœurs, le défi est relevé, on tourne les tables et, à chacun sa chaise, les plats défilent et s’épuisent dans la bonne humeur et les rires, les anecdotes et les coups hardis de fourchette.

 

Café, l’addition ! il faut partir, le temps nous a prévenus, il n’attend pas. Vincentellu  nous voici ! Véhicules garés à qui mieux mieux au carrefour de Celaccia, barrière franchie, nous nous dirigeons vers les sommets qui,  équipé de son bâton qui, de son seul enthousiasme, sommets où nous attendent nos ruines ancestrales, monceaux de vieilles pierres appareillées, monumentaux linteaux  pour deux ou trois vestiges de murs miraculeusement sur leur assise. L’allure est alerte, sans excès. Il faut ce qu’il faut. Un peu à pied, un peu en marchant, entre champignons et arbouses, cairns, balises rouges,  jaunes, bleues devant nous tracent la route. Enfin nous atteignons à l’extase, au nirvana des cimes, cependant que les quelques derniers dix mètres, en pente, raide comme la justice, sont un autre plat de résistance à avaler. Allez ! encore un effort. Ca y est ! Nous y sommes ! Quelle vue ! Quel calme ! Quel silence ! Oubliés la peine et le mollet à la traîne. Le temps est pour nous. L’œil se charge : Sartène, le Valinco, Cupabia. Plus près, en bas, tout en bas, Sollacaro brille sous le soleil. Majestueuse  est la maison de Federico d’Istria. Charlotte vient définitivement de fermer les volets de sa demeure. Il n’est plus rien, que le granite qu’elle a décidé, scellé sur la façade, disant au passant qu’ici naquit François Colonna d’Istria, philosophe, traducteur de Machiavel. L’air embaume la menthe souveraine que nous déracinons -chut, juste un brin !- pour la repiquer à Bicchisano aux côtés de ses sœurs retrouvées, poivrée, chocolat, bergamote… Elle agrémentera bien quelque omelette au brocciu ? Après le tour du propriétaire puis un autre dans la citerne, éventrée mais toujours là,  passées les traditionnelles remarques sur le lieu  « qu’il faudrait entretenir, restaurer… » nous redescendons, lestement… vers nos autos. La nuit nous touche. Bisous, bisous, à demain.

 

Demain n’a pas failli, nous non plus d’ailleurs, nous sommes là, au Livanti, le maître des lieux nous attend. La salle de réunion bruisse des premiers commentaires au pied de l’arbre généalogique. Le temps, encore une fois, s’est arrêté. Mille deux cents ans sous les yeux. On cherche untel, une telle. Ah ! Ça y est, je l’ai trouvé ou trouvée. On remarque avec discrétion les absents, les derniers nés, que l’on a oublié de signaler et qu’on voudrait tant voir, ou celui-ci qui n’est pas à sa place. Vingt et un mètres à parcourir, 37 générations, 1643 noms répartis sur 12 siècles nous contemplent,

 

tandis  que Jean-Laurent fidèle au poste, procède aux enregistrements, distribue badges et armoiries. Enfin, enfin, on commence. Discours d’accueil, brève intervention sur l’héraldique, découverte de nos armoiries de gueules et d’argent, étymologie des Colonna et Istria. Dernier sujet qui délie les langues et fait revenir Ugo della Colonna, plus vivant que jamais. Ressuscité. Perdus dans les méandres de l’Ister nous commençons à nous reconnaître là où les eaux se confondent et baignent l’antique Istria. Moins nombreux que lors des épisodes précédents, le contact est quasi charnel et tous existent pour n’être qu’un. Le barman est à pied d’œuvre est sacrifie à l’œuvre pie.

 

À table ! À table ! Ghislaine et sa brigade font aux fourneaux. Gageons qu’une fois encore ils se seront surpassés. Le  dernier verre évaporé, l’appétit aux abois, commence la ronde des assiettes. Charcuteries et crudités à ciel ouvert, on n’est pas là pour rigoler, pastachuta à courir, fromage, châtaignes grillées, châtaignes bouillies, ça n’mégotte pas ! fruits, et le final, le fraisier et son pendant le millefeuille. Bien entendu, nous n’avons pas fait le repas de l’âne -si tant est qu’Aliboron se fut jamais désaltéré à quelque barrique- Bacchus était des nôtres et donnait du tire-bouchon à l’envi.

 

Dehors en terrasse, on prend patience à ne rien faire. Dessous, deux plongeurs chassent sous l’œil indifférent d’un cormoran. Debout sur son récif, les ailes éployées, il sèche. Le Valinco, loin des tourmentes du large, se prélasse au bel azur. Là-bas, tout là-bas, sur l’autre rive, coule le Taravo.

 

On est bien, simplement.

 

Numériser          Antoine Colonna d’Istria

                       Président


L'héraldique