Le château d'Istria

Situé à 780 mètres sur la barre rocheuse qui sépare Sullacarò de l'Ulmetu, il commandait le col de Cilaccia et, par là, les anses de Porto-Pollo et de Propriano.  Il fut construit au XIIIème siècle par Luciano de Franchi. Lorsque Giudice de la Rocca assiégea le château  d'Istria, il tendit une embuscade : «Ce matin, au petit jour, il fit passer par le chemin royal qui va vers la Rocca vingt chevaux chargés de sommes de victuailles. A ce spectacle, les fantassins qui gardaient le château sortirent tous hors du château, à l'exception de deux...» que neutralisa alors aisément Giudice (Lucette Poncin, Guide du Taravo. Éditions Alain Piazzola).

Voici ce que relate Giovanni della Grossa :  « ... Pour en revenir à l'histoire de Giudice au temps où il vint habiter à la Rocca, il y avait à Istria une dame gênoise qui s'appelait Madonna Sibilia, belle-fille du gênois Luciano di Franchi qui avait édifié le château d'Istria et avait été appelé comme seigneur au temps où les gênois avaient gagné la bataille contre les Pisans... C'était une belle femme, de haute taille, avec une belle peau blanche, et elle était réputée par sa sagesse. Cette dame envoya à Giudice un message secret pour négocier avec lui leur mariage en échange de quoi elle lui donnerait le château d'Istria et la seigneurie de la pieve de Valle. Giudice lui fit dire qu'il serait heureux de se marier avec elle, et après accord, comme il était décidé qu'il irait chez elle pour conclure le mariage, Giudice se rendit à Istria. Quand il fut arrivé pour l'épouser, Sibilia, au lieu de le recevoir comme époux, le fit prendre et mettre en prison au fond de la tour et ensuite elle allait souvent le voir, et de loin lui montrait ses jambes, ses cuisses et sa poitrine et elle lui disait, à lui qui n'était pas bien gros : - Tu t'imaginais donc que j'allais mêler mes belles et blanches chairs avec les tiennes qui sont si noires ? - Et elle se moquait ainsi de lui. Au bout de quelques jours, Giudice se mit d'accord avec la chambrière de Sibilia qui lui apportait à manger et ils convinrent que si elle acceptait de le faire monter à la tour pour l'arracher à la prison et lui permettre  de s'emparer du château, il lui donnerait pour mari le gentilhomme qu'elle préfèrerait parmi ceux de sa cour qui n'avaient de femme. Cet accord conclu, la chambrière ayant favorisé le stratagème de Giudice, il fit savoir à ses gens de la Rocca qu'il leur demandait de venir de nuit et de s'embusquer autour de l'Istria. Lorsqu'ils entendraient le son du cor, ils devraient tout de suite courir à la porte du château. La chambrière respecta l'accord conclu, elle fit sortir Giudice de prison et le fit monter dans la tour où il sonna du cor. Les gens de Giudice l'entendirent, ils accoururent aussitôt à la porte du château, l'ouvrirent violemment et se précipitèrent, de sorte que Giudice resta maître du château d'Istria. Il dit à Sibilia : - Puisque tu n'as pas daigné toucher  ma chair  avec la tienne et que tu m'as trompé, je ne veux pas que mes chairs touchent les tiennes . - Aussitôt il fit construire une cabane ou une baraque dans la plaine de Celaccia, près du château d'Istria et de Celaccia, et il ordonna qu'elle fut placée là, et qu'elle fut prise par tous les soldats qui le voulaient, et il en fut fait ainsi. Quand il eut accompli cette vengeance, il la renvoya dans son pays. Giudice resta seigneur du château d'Istria et de la pieve de Valle...»(Chronique médiévale corse, p. 152-154, La Marge éditions).

Vincentello d'Istria, vice-roi de Corse, allié du roi d'Aragon, rebâtit la forteresse.