L’AIGLE À DEUX TÊTES

I. Des sources iconographiques au symbole maçonnique

par Pierre Mollier

Article paru dans le n° 107-108 (tome XXVII, 1996). Texte reproduit intégralement mais sans les notes et références bibliographiques, ni les illustrations.

L'Aigle à deux têtes est aujourd'hui l’emblème du système de hauts grades maçonniques le plus pratiqué dans le monde : le Rite Écossais Ancien et Accepté. À l'origine, les grades pratiqués sous la juridiction des Suprêmes Conseils tenaient fortement à la tradition judéo-chrétienne. Au terme d'une évolution de deux siècles ce rite se veut aujourd'hui porteur d'une spiritualité universaliste. Il est curieux de constater que cette vocation universelle existait virtuellement dans l’emblème choisi aux origines du rite. En effet, pour l'historien de l'iconographie « l'aigle est avec le dragon le seul animal qui appartienne à l'emblématique de tous les temps et de tous les pays ». Or depuis la plus haute antiquité des communautés humaines ont fait de l’aigle à deux têtes, mi-aigle, mi-animal fabuleux et qui par là tient au dragon, une figure emblématique. Lorsque dans le deuxième tiers du XVIIIe siècle la Franc-maçonnerie s’agrégera une partie du corpus symbolique occidental, l’aigle à deux têtes prendra naturellement place parmi ses emblèmes.


I. L'Orient aux origines de l'Aigle à deux têtes


A. NAISSANCE DE LA POSITION HÉRALDIQUE DE L'AIGLE À DEUX TÊTES CHEZ LES HITTITES

Peut-être les figurations à deux têtes sont-elles connues depuis des temps immémoriaux ? Ainsi une représentation féminine à deux têtes (Déesse-Mère ?) retrouvée à Catal Hüyük, une des plus anciennes villes du monde, a-t-elle pu être datée du sixième millénaire avant J.C. Les premières attestations de la figure de l'aigle à deux têtes sont aussi extrêmement anciennes. On les découvre dans le matériel archéologique laissé par la civilisation hittite qui s’épanouit en Asie Mineure entre le XXe et le XIIIe siècles avant notre ère.
Il s'agit d'abord de sceaux cylindriques trouvés dans les fouilles de Boghazköy, ancienne capitale hittite. Ils présentent de façon très claire un aigle bicéphale aux ailes déployées. La recherche d'une certaine esthétique conduit à cette position “héraldique” qui s'explique aussi par une tendance naturelle à la symétrie et la nature probablement religieuse de l'être représenté. La datation proposée par les scientifiques est de + ou – 1750-1715 et le contexte situerait l'origine de ces sceaux dans un milieu commerçant.
On retrouve cette image de l'aigle à deux têtes dans la même région dans deux oeuvres monumentales, à Alaça Hüyük (datée de + ou – 1400) et à Yazilikaya (1250 au plus tard).
Le contexte est ici différent et semble exclusivement religieux. L'aigle devient le symbole de la divinité. À Alaça Hüyük, l'aigle se trouve sur la face intérieure de l'orthostate portant les sphinx situés à l'entrée monumentale de cette ville. À Yazilikaya, il se trouve au milieu d'une procession de divinités, dont l'ensemble servit de sanctuaire en plein air.
L'aigle à deux têtes semble s'estomper dans la dernière période hittite, du IXe au VIIe siècles, et disparaître avec la fin de cet empire.

B. SELDJOUKIDES ET TURCOMANS : LA REDÉCOUVERTE DE L'AIGLE À DEUX TÊTES AU HAUT MOYEN-ÂGE

C'est dans la même région, mais deux mille ans après, que va réapparaître l'aigle à deux têtes. A partir de l'an mil, les Seldjoukides – seigneurs turcs de Mongolie convertis à l'Islam vers 920 – envahissent l'Anatolie. À la fin du XIe siècle les Seldjoukides d'Anatolie se séparent des Grands Seldjoukides d'Iran pour créer le royaume des Seldjoukides dit de Rum (Rome) car situé en pays byzantin. Ils établissent leur capitale à Nicée (Iznik), puis à Konya.
L'aigle à deux têtes se rencontre à profusion sous le règne du plus grand sultan seldjoukide de Konya, Alaeddin Keykübad (1219-1236) et de son fils et successeur Keyhusrem II (1236-1246). On le découvre en effet sur des tissus, des pierres taillées, des carreaux muraux ou des porte-Coran. Comme toute problématique iconographique il est très difficile de dire s'il s'agit d'un emprunt ou d'une recréation. L'un et l'autre auraient été facilités par le fait que les ancêtres des Seldjoukides connaissaient au Ve siècle un coq à deux têtes. Mais c'est bien d'un emprunt dont il s'agit chez les successeurs des Seldjoukides au tout début du XIIIe siècle, les Turcomans. Si l'on trouve des aigles à deux têtes sur certaines de leur pièces de monnaie en bronze, on y découvre aussi des motifs sassanides, grecs, romains, byzantins et chrétiens manifestement copiés sur des vestiges anciens.

C. BYZANCE : L'AIGLE À DEUX TÊTES EMBLÈME DE L'EMPIRE

Constantinople se veut la Nouvelle Rome et à ce titre l'emblématique de l'aigle y est bien connue, comme symbole de la puissance et de la souveraineté. À l'image des Césars et des Augustes de la Rome antique, le Basileus, l'empereur byzantin, souverain de l'Empire Romain d'Orient, porte l'aigle pour armes. Comment cet aigle impérial romain est-il devenu un aigle à deux têtes ? Une alternance de guerres et d'échanges commerciaux rythmait les relations étroites des Byzantins avec leurs voisins et ennemis, Seldjoukides puis Turcomans. L'aigle à deux têtes est très probablement arrivé à Constantinople sur les tissus ou les monnaies d'un marchand ou dans les souvenirs d'un soldat. Les lutrins des églises orthodoxes qui présentent cet emblème sont les cousins des porte-Coran seldjoukides. Par son caractère propre, l'aigle à deux têtes a dû peu à peu se développer dans l'art et l'emblématique jusqu'à infléchir le dessin de l'aigle impérial. C'est probablement le basileus Théodore II Lascaris (1254-1258) qui le premier fit de l'aigle bicéphale un emblème de l'empire. Il faut dire que les deux têtes de l'aigle symbolisaient particulièrement bien la double souveraineté temporelle et spirituelle à laquelle prétendaient les basileus. Par la suite l'emblématique de l'aigle à deux têtes sera toujours très présente dans l'église orthodoxe grecque, jusqu'à en devenir l'emblème officiel ! Les aigles à deux têtes des pays balkaniques, ainsi que celui de l'empire russe, sont directement hérités de Byzance.


II. L'Aigle à deux têtes dans l'Occident médiéval

A. APPARITION DE L'AIGLE À DEUX TÊTES L'ART ROMAN

On découvre quelques exemples d'aigle à deux têtes dans la sculpture romane des églises de Vouvant (Vendée), Civray (Vienne), Gensac-la-Pallue et Sainte-Colombe (Charente), Moissac (Tarn-et-Garonne), Vienne (Isère). Sans qu'il soit possible de les dater très précisément, aucune de ces églises ne semblent postérieures au XIIe siècle.Comment cette figure d'origine orientale a-t-elle pu rejoindre puis s'épanouir au coeur de l'Occident médiéval ? Suivons les explications d'Emile Mâle sur un itinéraire iconographique classique qui pourrait bien être aussi celui de l'aigle à deux têtes :

« Au temps de Saint-Bernard, c'est-à-dire en pleine époque romane, les fleurs et les animaux qui ornent les cloîtres et les églises sont la plupart du temps des copies d'originaux antiques, byzantins, orientaux, que l'artiste reproduisait sans en comprendre le sens.
L'art décoratif du Moyen-Age a commencé par l'imitation. Ces prétendus symboles ont été souvent sculptés d'après le dessin d'une étoffe persane ou d'un tapis arabe.
A mesure qu'on l'étudie mieux, l'art décoratif du XIe et du XIIe siècles apparaît de plus en plus comme un art composite qui vit d'emprunts. Les multiples éléments dont il est fait commencent à se laisser entrevoir. Les chapiteaux romans nous montrent fréquemment, par exemple, deux lions disposés symétriquement de chaque coté d'un arbre ou d'une fleur. Irons-nous avec l'abbé Auber, en chercher le sens dans les livres des théologiens du XIe siècle ? – Nous perdrions notre temps, car ces deux lions, Lenormand l'a prouvé, ont été copiés sur quelque étoffe fabriquée à Constantinople d'après de vieux modèles persans. Ce sont les deux animaux qui veillent sur le hom, l'arbre sacré de l'Iran. Les tisserands byzantins n'en savaient déjà plus le sens et n'y voyaient qu'un dessin industriel d'une disposition heureuse. Quant à nos sculpteurs du XIIe siècle, ils imitaient les figures du tapis byzantin apporté en France par les marchands de Venise, sans se douter qu'elles pussent avoir une signification quelconque. »

Or il se trouve que l'on a justement découvert lors de travaux dans la cathédrale de Périgueux, en 1895, un tissu d'origine orientale présentant des motifs d'aigle à deux têtes. Appelé “Le Suaire de Saint-Front”, il s'agit d'un morceau de soie du XI-XIIe siècle, d'origine Grand-Seldjoukide, turcomane ou provenant d'un atelier de Constantinople, voire de l'Espagne musulmane. Il s'agirait d'un morceau de chasuble d'un évêque dont les restes ont été transférés avec ceux d'autres évêques, et emmurés en 1173.
Un dernier élément renforce la thèse de l'emprunt à l'Orient. l’aigle à deux têtes semble bien représenté dans les blasons des principaux participants des croisades. Jourdain d'Amphermet, Jean de Dion, Hamelin et Geoffroy d'Antenaise, Jean de la Béreaudière, Le Meigre, Amaury de Saint-Cler, Hugues de Sade et Laurent de la Laurencie portent l’aigle à deux têtes.

B. L'AIGLE À DEUX TÊTES DANS LES SCEAUX ET LES ARMOIRIES

Les armoiries apparaissent sur les champs de bataille du XIIe siècle pour permettre aux combattants de se reconnaître au coeur de la mêlée… Les animaux furent parmi les premières figures utilisées. Les armoiries animalières constituent 60 % des armoiries vers 1180, 40 % vers 1250 et se stabilisera autour de 30 %, puis vers 25 % au cours du XIVe siècle. L'aigle – monocéphale – est l'une des grandes figures de l'héraldique. Mais « Dans les armoiries occidentales, son indice de fréquence est cependant très inférieur à celui du lion : au Moyen-Âge on compte environ un écu à l'aigle pour six écus au lion, et à l'époque moderne le rapport semble passer de un à dix. C'est surtout la rareté de l'aigle dans les armoiries roturières qui explique ces différences. L'aigle est en effet essentiellement une figure héraldique nobiliaire, symbole de puissance et d'autorité ».
« L'origine et la signification de l'aigle à deux têtes sont des sujets qui ont fait couler beaucoup d'encre. Il semble bien que ce soit avant tout un thème essentiellement graphique et que le blason l'ait emprunté, tardivement, à l'iconographie orientale ». Le plus ancien exemple français est celui du sceau apposé en 1227 par un Chevalier… de l'Ordre du Temple, Guillaume de l’Aigle, Commandeur du Temple en Normandie.
Le second cas est celui de Jocelin de Chanchevrier daté de 1229. On a pu calculer que jusqu'en 1300, dans les armoiries françaises, à peine 7 % des aigles étaient bicéphales.
L'aigle à deux têtes n'est donc pas un motif héraldique quantitativement important. En revanche la qualité de certaines personnalités l'ayant pour arme a pu contribuer à en donner une image particulière. Ainsi découvre-t-on qu'il constitue les armes de Bertrand du Guesclin (1320-1380). Héros de tournoi, chevalier errant et justicier au renom légendaire, guerrier victorieux puis connétable de France, on fit de lui sous Charles VI, le type du parfait chevalier.
Or Bertrand du Guesclin portait « d'argent à l'aigle à deux têtes de sable, à la côtice de gueules brochant sur le tout, becquée, lampassée et armée de gueules ». L'aigle à deux têtes se voit donc associé dans l'imaginaire médiéval au type du parfait chevalier.
Outre sa présence dans les armoiries des chevaliers croisés, l’aigle à deux têtes constitue le blason d’un Ordre hospitalier du Moyen-Âge, les Chanoines réguliers de Saint Antoine qui portent « D’or à un aigle de sable à deux têtes, diadémé de même, ayant le vol étendu et au col une couronne d’or, en forme de collier, duquel pend un écusson aussi d’or, posé sur la poitrine de l’aigle et chargé d’un tau ou taph d’azur ».

C. L'AIGLE À DEUX TÊTES DANS L'EUROPE MODERNE

Plus on avance vers le XVe siècle plus l’aigle à deux têtes se développe dans les pays germaniques auquel il est souvent exclusivement associé aujourd’hui, plus à tort qu’à raison. Mais « malgré quelques témoignages exceptionnels à l'époque de Frédéric II, ce n'est que sous l'empereur Sigismond, c'est-à-dire au début du XVe siècle, que l'aigle bicéphale devint définitivement la figure héraldique de l'empereur, tandis que l'aigle monocéphale était désormais réservé au roi des Romains ».
En héraldique, à la fin du XVIIIe siècle, l’Aigle éployé entre dans les armes de près de 500 familles européennes dont, pour 200 d’entre-elles, il constitue les armes complètes.

III. Les débuts de l’Aigle à deux têtes en Maçonnerie


L’Aigle à deux têtes apparaît en Maçonnerie en France dans le tout début des années 1760 avec le grade de Grand Inspecteur Grand Élu ou Chevalier Kadosh. On le découvre ainsi dans la fameuse lettre que les Maçons de Metz écrivent à ceux de Lyon en juin 1761. Ce précieux courrier a pour objet l'information réciproque des dignitaires de l'ordre sur les grades connus ou pratiqués dans les deux orients. Les Maçons lorrains y expliquent que le grade le plus élevé qu'ils pratiquent est celui de « Chevalier Grand Inspeur Grand Elû der grade », en conséquence, « Tous les grades […] sont tous subordonnés à ce dernier » , or :

«Le petit attribut [de ce grade] est un aigle d'or éployé portant une couronne de prince sur les deux têtes et tenant un poignard dans ses serres. Le grand attribut est une Croix rouge à 8 pointes semblable à celle de Malthe ; sur le centre, dans un Cercle, sont une Epée et un poignard en sautoir»

On trouve justement au bas de la copie d'un procès-verbal conservée dans les archives de la Loge « de Saint Jean » de Metz un très beau sceau présentant un aigle à deux têtes. Ce document est daté du 25 avril 1763 et il n’est pas indifférent que le signataire en soit le frère Le Boucher de Lénoncourt. On le connaît en effet comme l’un des principaux promoteurs du grade de Kadosh dans les années 1760. Ce sceau présente donc très probablement l’iconographie première de l’aigle à deux têtes en Maçonnerie. Peut-on attribuer la réalisation de ce sceau à Augustin Pantaléon, l'une des personnalités du cénacle animé par Le Boucher de Lénoncourt, qui exerçait la profession de graveur ? Nous aurions donc là, à la fois le dessin originel de l'aigle à deux têtes dans l'Ordre maçonnique et son auteur !
Dans un courrier confidentiel à Willermoz, Meunier de Précourt révèle l'enseignement secret du grade de Grand Inspecteur Grand Élu ou Chevalier Kadosh : les francs-maçons sont en fait les descendants de « ces fameux infortunés T....... [Templiers] ». Il y ajoute une glose sur l'emblème du grade :

« L'aigle portant un poignard dans ses serres avec ces mots : Neccum Adonay, Vengeance à Dieu, nous représente les dernières paroles de Jacques de Molay, dernier Grand Maître, quand il ajourna le pape et le roy ; ajournement terrible vérifié par l'événement. L'aigle, l'animal qui plane le plus haut dans les airs et le seul qui fixe le soleil, est le juste emblème de cet infortuné vieillard »

Dans la lettre suivante où Meunier de Précourt entreprend d'exposer dans le détail les liens entre les Templiers et les Chevaliers G.I.G.E. , l'explication est un peu différente. Ce sont en effet les Templiers survivants au supplice qui :

« Comme l'aigle est le Roy des oiseaux et le seul qui regarde fixement le soleil, ils le prirent pour devise en l'armant d'un poignard dans les serres, comme pour demander justice à la divinité d'un aussi horrible attentat »

On doit noter que ces explications n'éclairent pas sur le caractère éployé de la dite aigle. Peut-être celui-ci devait-il contribuer à assurer la préséance du Kadosh sur un autre grade apparu à la même époque et qui allait contester au Chevalier G.I.G.E. le rôle terminal de Nec plus Ultra de la maçonnerie : le Chevalier de l'Aigle Rose-Croix. La symbolique de l'aigle – monocéphale – y joue en effet un rôle. Mais peut-être, tout simplement, l'aigle à deux têtes, dont les qualités chevaleresques et de souveraineté appartenaient au fond commun de la symbolique occidentale, apparut-il particulièrement adapté pour ce grade auquel « Tous les [autres… devaient être] subordonnés » ; grade qui en conséquence se voulait porteur des plus précieuses révélations de la Maçonnerie et aspirait à gouverner l'Ordre.
Toujours est-il que le G.I.G.E. ou Chevalier Kadosh allait connaître une grande fortune dans la Maçonnerie française des années 1760 et avec lui son emblème, l’aigle à deux têtes. Ainsi, dès 1762, les dignitaires de la Grande Loge des Maîtres de Paris, dite de France, avec à sa tête le substitut du Grand Maître, Chaillon de Jonville, s'annoncent « décorés du Grade par Excellence de G.I.G.E. ». Tous les rituels manuscrits de G.I.G.E. ou Chevalier Kadosh qui nous sont parvenus présentent l’aigle à deux têtes comme l'emblème du grade. Celui-ci se trouve ainsi associé au Nec plus Ultra de la Maçonnerie et devient donc, de fait, le symbole d'une fonction dirigeante dans la Première Grande Loge de France.

(à suivre)

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